Les rapports entre glaucome et chirurgie réfractive sont souvent source d’un certain nombre de malentendus, y compris chez certains ophtalmologistes, en particulier lorsqu’ils ne sont ni croyants ni pratiquants pour la chirurgie de la myopie, de l’hypermétropie, de l’astigmatisme ou de la presbytie.
Toute chirurgie réparatrice des anomalies de la vision suppose en effet un certain nombre de pré-requis, et la notion d’une maladie évolutive telle qu’un glaucome, ne place pas le patient candidat à une telle chirurgie dans les meilleures dispositions.
Il est évident que face à un patient souffrant d’un glaucome évolué ou mal équilibré par son traitement médical, toute chirurgie réfractive est hors de propos.
Il n’en va pas même face à un patient souffrant d’un glaucome modéré, parfaitement équilibré sous traitement médical, et désirant s’affranchir du port des lunettes. La situation est encore différente chez un patient non glaucomateux, mais chez lequel il existe des antécédents familiaux incitant à une surveillance attentive destinée à dépister les signes d’un glaucome débutant.
Dans ces deux dernière situations, l’essentiel est de tenir compte du fait que le chiffres de tension oculaire seront modifiés en postopératoire, surtout après chirurgie de la myopie par Lasik, du fait de l’amincissement de la cornée induit par la chirurgie.
On sait en effet qu’il existe, indépendamment de la chirurgie, des biais de mesure de la tension oculaire liés à l’épaisseur cornéenne. La tension mesurée apparaît ainsi plus élevée lorsque la cornée est plus épaisse et plus basse lorsqu’elle est plus fine.
On peut ainsi poser un diagnostic erroné de glaucome chez des patients dont la cornée est très épaisse, mais surtout, on peut méconnaître un glaucome vrai chez certains patients dont la tension oculaire est apparemment normale, mais sous-estimée du fait d’une cornée fine. Cette dernière hypothèse est évidemment plus dommageable car elle peut aboutir à des diagnostics de glaucome extrêmement tardifs alors que la maladie à détruit une grande partie des fibres du nerf optique.
La rapport entre glaucome et chirurgie de la myopie est que l’amincissement cornéen lié à la chirurgie en Lasik ou en PKR entrainera une baisse apparente de la tension, proportionnelle à l’amincissement induit, lui-même proportionnel à la myopie opérée.
Dans des situations de glaucome modéré ou de situation à risque familial de glaucome, il faut donc tenir compte de cette modification et avoir une nouvelle grille de lecture des chiffres de tension oculaire, tenant compte de l’amincissement cornéen.
Il est également capital d’expliquer au patient cette modification des chiffres de tension après Lasik, afin qu’il informe de cette chirurgie tout autre ophtalmologiste qui serait amené à s’occuper de lui ultérieurement, alors que les traces de la chirurgie de la myopie auront peut-être disparu puisqu’ils peuvent parfois devenir indiscernables avec le temps.
Docteur Arié Danan. Paris, le 3 février 2013.
Bonjour,
Je suis particulièrement intéressé par cet article car je suis un jeune homme de 29 présentant un SDP avec un probable pré-glaucome – Champs visuel normal – traité au Monoprost que je ne supporte pas très bien (comme tous les collyres précédents). Au delà d’avoir l’impression de suivre un traitement contraignant pour rien (bien que j’ai conscience des risques de développer un glaucome pigmentaire), le coup de poignard a été de me dire que je n’étais pas éligible à la chirurgie réfractive (sans examen pré opératoire) car j’aiun pré glaucome et qu’on ne pourrait plus bien mesurer ma tension (inexistante…).
Pensez-vous que dans mon cas une opération de la myopie -5,50 OD et – 6,00 0G est envisageable si stable ?
Bonjour
Je comprends votre désarroi et je ne peux que vous confirmer les notions abordées dans cet article : un glaucome équilibré sous traitement (ou a fortiori un pré-glaucome) ne constitue pas une contre-indication à la chirurgie de la myopie. L’apparente amélioration des chiffres pressionnels après chirurgie est en rapport avec l’amincissement cornéen mais cette amélioration est prédictible et mesurable et impose simplement de modifier la grille de lecture des chiffres de pression intraoculaire (PIO) au décours de la chirurgie. A contrario même, si votre épaisseur cornéenne actuelle est importante, elle majore le niveau apparent de la PIO, et on peut alors même imaginer que les chiffres mesurés en postopératoires seront plus fidèles à la réalité.
Quoi qu’il en soit, la surveillance de l’évolution passe évidemment aussi par la réalisation d’examens complémentaires tels que le champ visuel et l’OCT, dont les résultats ne sont absolument pas modifiés par la chirurgie réfractive.
Donc, très clairement, non : il n’est pas logique de vous écarter de la chirurgie réfractive du fait de ce pré-glaucome, si cette chirurgie est par ailleurs rendue possible par l’analyse des autres critères d’inclusion en chirurgie réfractive.