La sécheresse oculaire, modérée et transitoire, est sans doute la complication la plus fréquente des chirurgies au laser réalisées en technique Lasik, qu’il s’agisse de chirurgies de myopie ou de chirurgies de presbytie.
Elle s’explique par la section, au cours du Lasik, des terminaisons nerveuses intra-cornéennes, qui rompent l’arc réflexe existant entre sensibilité cornéenne et production de larmes par les glandes lacrymales. A l’état normal, toute irritation perçue par ces terminaisons nerveuses a en effet pour conséquence une production accrue de larmes. Dans les suites immédiates du Lasik, la perte de sensibilité cornéenne liée à la section nerveuse se traduit ainsi par une diminution de la sécrétion lacrymale. La repousse progressive de ces terminaisons nerveuses dans les semaines suivant la chirurgie Lasik conduit à la diminution puis à la disparition de la sécheresse oculaire induite. La sécheresse est habituellement moins importante en technique Lasik tout-laser, utilisant le laser femtoseconde, car le volet cornéen découpé est moins épais qu’en Lasik classique, rendant ainsi la section nerveuse plus superficielle.
Pour l’immense majorité des patients, cette sécheresse est transitoire, ne durant que quelques semaines, et n’entrainant que peu de perceptions pour le patient du fait de la prescription systématiques de substituts lacrymaux sous forme de collyres plus ou moins épais et plus ou moins visqueux. Il peut cependant être difficile, au cours des premières semaines postopératoires, d’apprécier de façon précise le résultat de la chirurgie, car une sécheresse importante peut s’accompagner de perturbations de la vision, qui disparaissent dès que l’hydratation cornéenne est revenue à un niveau normal. Il faut donc souvent, à ce stade, rassurer les patients quant à un résultat visuel qu’ils estiment imparfait, et ne surtout pas se précipiter à faire une retouche inutile.
Lorsque la chirurgie Lasik est réalisée en période chaude et sèche, il est souvent nécessaire de prolonger un peu plus la prescription de larmes artificielles.
L’existence d’une sécheresse cornéenne modérée avant la chirurgie n’est pas une contre-indication au Lasik car cette situation est en réalité assez fréquente chez les porteurs de lentilles de contact développant une intolérance aux lentilles qui les conduit à demander une opération de la myopie. La sécheresse oculaire est en effet souvent une des composantes de l’intolérance aux lentilles de contact, et l’intolérance aux lentilles de contact est l’une des situations motivant pour la chirurgie des patients non désireux de revenir au port de lunettes.
Il faut être en revanche prudent chez les patients présentant une sécheresse oculaire médicamenteuse, en particulier si elle est en rapport avec un traitement anti-acnéique à base de dérivés de la vitamine A acide. Chez ces patients, il est préférable de différer la chirurgie car ces traitements ne sont pas prescrits au long cours mais seulement pour des périodes de quelques mois.
Quoi qu’il en soit et malgré la sélection des indications, il arrive qu’une sécheresse cornéenne importante soit observée, accompagnée de signes fonctionnels gênants et de difficultés visuelles notables. C’est dans ces situations que l’on peut être amené à poser des bouchons lacrymaux en silicone. Leur principe est simple : en bouchant la voie d’élimination des larmes, ces bouchons permettent de “rentabiliser” un peu plus la faible quantité de larmes produites. Ces bouchons se posent de façon très simple au cabinet de consultation et peuvent être laissés en place plusieurs mois, lorsqu’ils ne sont pas spontanément perdus. Leur ablation est tout aussi simple que leur mise en place.
De façon très exceptionnelle, on peut observer chez certains patients la persistance d’une sécheresse oculaire conduisant à laisser les bouchons en place tout en assurant une supplémentation prolongée en larmes artificielles.
Docteur Arié Danan. Paris, le 29 septembre 2012